JO 2024. Carte blanche à Isabelle Autissier : « Des JO pour demain »

Première des cartes blanches publiées dans L'Édition des Jeux, notre magazine 100 % numérique consacré aux Jeux olympiques : Isabelle Autissier.

Dans le cadre des Jeux olympiques, Ouest-France a demandé à des auteurs renommés de rédiger une carte blanche sur les Jeux olympiques, chroniques publiées dans notre magazine numérique spécial Jeux olympiques : « L'Édition des Jeux. » Isabelle Autissier, navigatrice, écrivaine et présidente d'honneur du WWF France a inauguré ces chroniques.

« Désolée, pendant les JO, je me trouve quelque part du côté des îles Hébrides extérieures. Non pas qu'aucune compétition ne m'intéresse, mais l'appel de la mer est ma priorité absolue auquel rien n'a jamais dérogé.

Pourtant, je m'intéresse aux JO de Paris depuis 2016 ! Au titre du WWF France, dont j'étais à l'époque la présidente, nous avons, à leur demande, accompagné la candidature, pour les aider à viser une excellence environnementale. Vaste débat, lorsque l'on considère qu'il s'agit de déplacer des millions de gens, de les loger, de les nourrir et, bien sûr, d'équiper les sites pour que les athlètes puissent concourir !

Traiter ce dossier est un formidable cas d'école. En premier lieu, il s'agit de reconnaître qu'aucune des activités humaines ne peut se passer aujourd'hui de changer de méthodes et de comportements au vu de l'urgence écologique. Ensuite, il faut des objectifs, comme, par exemple, une empreinte carbone réduite de 55 % par rapport aux Jeux de Londres. Puis il faut décliner les moyens : récupérer le maximum de bâti existant plutôt que construire ; bâtir avec les meilleurs standards et les matériaux les moins impactants ; permettre des déplacements doux par pistes cyclables ou transports en commun ; fournir une alimentation moins carnée, et plus locale ; se fournir en électricité verte ; limiter les déchets et encourager le réemploi ; favoriser la création d'espaces verts et limiter l'imperméabilisation… La liste est infinie. Elle suppose aussi des moyens financiers, des politiques publiques, des choix stratégiques, d'appels d'offres, des contrôles. Enfin, quels legs ces Jeux laisseront-ils dans les territoires ? Des « éléphants blancs », peu utilisés et chers à entretenir ou des équipements qui manquaient cruellement pour développer la pratique du sport, des transports, des filières d'approvisionnement basses en carbone, des sensibilisations et des formations ?

Tout ceci semble assez loin de l'enthousiasme des compétitions, des larmes de bonheur ou de déception, qui font la beauté et l'humanité du sport. Rassurons-nous, les moments de jubilation auront lieu, de toute façon. Mais en tentant de changer de méthodes pour s'adapter aux temps qui viennent, les Jeux de Paris signent a minima leur citoyenneté et peut-être plus, leur capacité à inventer un modèle qui peut perdurer, dans un monde qui met, de plus en plus, en balance l'incitation ou l'urgence à faire, face aux conséquences environnementales supportées par la société tout entière. La fierté à bien faire ne peut qu'amplifier les joies du spectacle. »

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