Alain de Royer-Dupré, de cavalier de concours à entraîneur de chevaux de courses

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Avec un père directeur de haras, l'amour pour les chevaux était quasiment inévitable pour Alain de Royer-Dupré. Pourtant, au fil de ses rencontres, il s'est pris de passion pour les pur-sang anglais, ces animaux si fragiles et puissants à la fois. Jusqu'à en délaisser les selle français pour devenir metteur au point de l'écurie princière de l'Aga Khan, dans le plus grand centre d'entraînement d'Europe.

Par Stella BANDINU (Equidia)

Né en septembre 1944 dans la Sarthe, Alain de Royer-Dupré est le fils d'un directeur des Haras Nationaux. De Saint-Lô (50), le jeune homme apprend les races, la génétique, l'élevage, et se prend d'amour pour le concours complet. Tant et si bien qu'au moment de faire son service militaire, le cavalier est affecté à la section équestre du bataillon de Joinville (94).

Dans ce lieu mythique, une rencontre fera basculer sa façon de penser : Jack Le Goff, cavalier olympique et futur entraîneur de l'équipe américaine de concours complet. « C'est la personne qui m'a le plus impressionnée dans le milieu des chevaux. C'était un super cavalier, un grand homme de cheval. Éclectique. Il aimait sa spécialité mais regardait aussi les courses avec intérêt. Tout ce qui avait trait au cheval le passionnait. » Un portrait qui, plus de cinquante ans plus tard, pourrait tout aussi bien être le sien.

Changement de carrière

Car l'intérêt d'Alain pour la mise au point n'est pas récent. Propulsé au haras du Mesnil par un stage de lycée, l'adolescent se plaît bien au contact de la famille Couturié et de sa matriarche, « l'arrière grand-mère de Henri Devin ». Avec eux, il découvre les pur-sang anglais et assiste aux premiers pas des grands champions de l'histoire des courses. Alors, quand la doyenne lui demande de rester, le vingtenaire s'exécute. L'aventure durera neuf ans avant qu'il ne décide de s'envoler vers un autre quotidien pour assouvir son envie d'entraîner. « Je crois que la compétition me manquait », résume-t-il simplement. 

Et c'est ainsi que débute sa carrière dans le galop français, toujours dans la Sarthe, « un endroit où il y a du sable naturel presque partout, ce qui permet de faire des pistes n'importe où. Tout ça mis ensemble m'a permis de commencer avec deux ou trois chevaux réparés d'obstacle ». La suite logique pour un ancien cavalier de concours complet. « Ça m'amusait de mettre mes compétences de cavalier au service des courses. Et puis, très vite, ça m'a permis de toucher quelques bons chevaux, d'abord en obstacle, puis en plat. » 

« J'ai appris en les regardant »

Ainsi, pendant douze ans, l'homme entraîne depuis son antenne Sarthoise. Il le fait pour lui d'abord, puis pour des clients, dont des Parisiens convaincus par ses résultats mais pas seulement. Ils reconnaissent également sa méthode d'entraînement un peu différente de celle que l'on apprend dans les grandes maisons. « J'ai formé très tôt une équipe, avec des cavaliers qui connaissaient bien les courses. Parce que moi, je ne connaissais pas la réalité des choses. Donc j'ai appris avec eux, en les regardant, notamment un jockey qui s'appelait René Lecomte. Il revenait de chez François Boutin à Paris, un entraîneur en vogue à l'époque. Je lui dois beaucoup parce que j'ai regardé ce qu'il faisait, tout simplement. J'ai appris avec lui et additionné ça à mes bases d'équitation. »

De la Sarthe à Chantilly

Grâce à cette stratégie, l'ancien cavalier se fait vite repérer des grandes maisons comme Rothschild, mais pas que. Déjà à la tête d'un bel effectif, le Prince Karim Aga Khan IV cherche quelqu'un pour placer ses « seconds couteaux ». S'ils ne sont pas assez doués pour évoluer sous la férule de François Mathet, son entraîneur maison, ils le sont trop pour être réformés sans rien tenter. C'est ainsi que débute une collaboration de plusieurs décennies, d'abord à distance, puis à Chantilly, dans l'antre des galopeurs, jusqu'en 2021, date à laquelle le maître décide de raccrocher pour laisser la place à la jeunesse. 

Installé parmi les meilleurs entraîneurs du pays, Alain de Royer Dupré quitte la scène avec plus de 30 000 succès, dont 93 au meilleur niveau. Une vie dédiée au cheval qui se lit dans chaque objet de sa décoration, dans chaque souvenir qui l'anime. Et dans une Légion d'Honneur, décernée en 2022. Le parfait exemple d'une passion transformée en accomplissement.

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