Virus émergents : « Il faut mieux surveiller, au-delà des Jeux olympiques »

Le Pr Xavier de Lamballerie, spécialiste des maladies virales émergentes, se félicite d'une prise de conscience mais estime que le système de remontées d'information doit intégrer cas humains et animaux.

Le Pr Xavier de Lamballerie, professeur de virologie à l'Université d'Aix-Marseille, dirige un laboratoire consacré aux maladies virales émergentes. Il est membre du Covars, le Comité de veille et d'anticipation des risques sanitaires créé après la crise du Covid-19.

L'an dernier, le Covars alertait sur le risque croissant de maladies en lien avec le moustique tigre (dengue, zika chikungunya) en métropole, notamment avec les Jeux olympiques (JO). Vos préconisations ont-elles été suivies ?

Quand on fait des recommandations on sait que tout ne sera pas suivi immédiatement, mais l'important est de bien attirer l'attention. Tout n'a pas été fait selon nos préconisations, mais beaucoup d'efforts ont été réalisés en amont des JO. Les choses ont bougé dans l'anticipation de foyers de maladies émergentes.

Mieux surveiller les maladies émergentes

Pour l'instant aucune alerte sanitaire liée aux Jeux n'a été déclarée. Les JO sont-ils pourtant un moment sensible ?

Il y a beaucoup de brassage dont beaucoup d'introductions potentielles de virus. Mais si vous regardez la dengue, il y a déjà plusieurs milliers de cas importés chaque année. Les JO ne durent pas très longtemps. Le risque d'un gros problème sanitaire est faible, ou alors plutôt après les Jeux. Une fois les manifestations sportives terminées, la question restera la même : comment peut-on mieux surveiller les maladies émergentes ? Il faut mieux surveiller, au-delà des JO.

Il y a une prise de conscience sur ce sujet ?

Oui. On le constate, dans les instances sanitaires et la communauté scientifique, le sujet a pris de la place très vite. Maintenant, il faut avancer sur certains points. Dans un avis du Covars d'avril dernier, nous insistions sur l'importance de faire évoluer le système d'information. Cela prend un peu de temps du temps et cela coûte de l'argent, mais on n'a pas beaucoup d'alternatives.

Les systèmes de remontées d'information des maladies ne sont pas pertinents ?

Ils sont un peu anciens et assez basiques. Ils ne permettent de remonter que des cas de maladies humaines. Pour la dengue, qui ne concerne que le moustique et l'homme, ce n'est pas un problème, mais pour un virus comme le West Nile, c'est insuffisant.

Pourquoi et avec quelles conséquences ?

Le West Nile passe d'oiseaux infectés aux moustiques, qui piquent chevaux et hommes. On aurait besoin d'interconnecter ces informations, qui devraient être également disponibles dans les logiciels de l'Établissement français du sang (EFS). S'il y a beaucoup de virus West Nile dans un secteur, il faut que l'EFS le sache, pour s'adapter, différer ses collectes ou utiliser les bons tests moléculaires…

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