NFL Team Honors IX : Kansas City

08/07/2024 11:00 AM

La formule a été un peu différente, mais le résultat a été le même : quoi de plus logique que Kansas City devienne la première équipe à réaliser le doublé depuis New England en 2003 et 2004 ; cette finale AFC 2018 (remportée en prolongations par les Patriots) était réellement le passage de témoin entre les deux dynasties. Les choses n’ont pourtant pas été faciles avec une inversion du rapport de force entre les deux escouades principales, cependant la culture de la gagne avec cette capacité de sortir le drive ou l’action qui fait pencher la balance du bon côté est toujours là, et désormais le duo Andy Reid – Patrick Mahomes va s’attaquer à un autre Everest : le triplé inédit dans l’histoire du Super Bowl.

À lire comme une évidence.

KANSAS CITY CHIEFS
1er AFC West ~ 11-6 / 4-0

Les prévisions de Madame Soleil 2023

Madame Soleil demandait humblement d’être exemptée de taper tout un laïus, aussi bien écrit soit-il, pour finir par dire « Kansas City était l’équipe à battre en AFC et en NFL ». Comment ça non ? Bon. Andy Reid était là depuis 2013, ce qui donnait en 10 saisons : 9 qualifications en playoffs, 7 titres de division consécutifs, 5 finales AFC consécutives, 3 finales, 2 Super Bowls et 1 moustache. Si la moustache était éternelle, les autres séries étaient évidemment en suspens… enfin, sauf celle de qualification en playoffs à moins d’une catastrophe.

Car visiblement il fallait vraiment y aller pour forcer Patrick Mahomes à sortir du terrain ; c’était d’ailleurs pourquoi il ne tentait plus de QB sneak (rappelez-vous en 2019 il s’était disloqué la rotule). Le #15 continuait d’être le visage de la ligue, étant le premier Most Valuable Player à remporter le Super Bowl au XXIe siècle (le dernier étant Kurt Warner en 1999), et il repartait au combat avec un groupe de cibles qui avait de nouveau connu du chamboulement ; rien de la magnitude de Tyreek Hill, mais JuJu Smith-Schuster et Mecole Hardman avaient quitté les champions en titre. Cela allait pousser Kadarius Toney à confirmer son rebond dans un temps limité aux côtés de Marquez Valdes-Scantling et du sophomore Skyy Moore en qui l’équipe fondait beaucoup d’espoirs ; le deuxième tour Rashee Rice s’ajoutait à la liste alors qu’au-dessus de tout ce petit monde planait l’inévitable Travis Kelce qui s’était fait une belle peur au genou mais qui allait revenir.

Un autre secteur qui devait se recomposer avec la Free Agency était la ligne offensive, ce qui était d’autant plus surprenant qu’elle avait bien fonctionné en 2022. Les ailes voyaient arriver de nouvelles têtes : Orlando Brown et Andrew Wylie laissaient la place à l’ex-Buccaneer Donovan Smith à gauche et l’ex-Jaguar Jawaan Taylor à droite ; les deux sortaient d’une saison pas forcément évidente et allaient vouloir se relancer un peu dans le Missouri. À l’intérieur, le solide trio Joe Thuney – Creed Humphrey – Trey Smith était fiable et disponible, deux qualités qui seraient encore vitales. Enfin, histoire de rappeler que les choses allaient vite en football surtout quand vous étiez un coureur, Isiah Pacheco avait volé la vedette à Clyde Edwards-Helaire et devait encore mener la charge au sol, avec la menace aérienne Jerick McKinnon pour faire suer les Linebackers adverses.

La défense faisait le nécessaire pour ne pas se mettre dans les pattes de l’attaque ; elle avait même progressé sur plusieurs aspects l’année dernière, notamment la capacité à limiter les big plays, ce qui était terrible pour l’adversaire quand l’offensive des Chiefs était la meilleure de la ligue à les générer. Steve Spagnuolo savait comment tirer le maximum de ses joueurs, et il devait compenser quelques pertes, à commencer par celle du Defensive End Frank Clark (et accessoirement de Carlos Dunlap) : c’était l’heure pour George Karlaftis de sauter quelques échelons, surtout au vu de l’imbroglio contractuel avec Chris Jones ; le premier tour Felix Anudike-Uzomah avait débarqué pour préparer le futur, alors que l’ex-49er Charles Omenihu allait purger six matchs de suspension. Mike Danna était toujours présent, alors que Derrick Nnadi végétait depuis quelques saisons. Au coeur de l’escouade, Nick Bolton avait réussi avec brio son examen de passage, devenant le patron ; Willie Gay l’accompagnait derechef avec l’ex-Charger Drue Tranquill et le jeune Leo Chenal en soutien.

La couverture avait souffert en 2022 à cause de la furia offensive, et elle souhaitait trouver un peu plus de stabilité. Il faudrait notamment surveiller le sophomore Jaylen Watson qui avait connu des difficultés en remplacement de Rashad Fenton parti à Atlanta. L’Jarius Sneed allait encore avoir du travail, alors que Trent McDuffie pouvait faire une saison pleine maintenant qu’il était positionné dans le slot. Le dernier changement était au poste de Safety où Juan Thornhill avait fait ses valises, passant le relais à Bryan Cook ; Justin Reid était le taulier d’une dernière ligne de défense qui avait été un peu trop permissive.

Les équipes spéciales avaient lutté principalement à cause de la blessure du Kicker Harrison Butker, à lui de se remettre dans le bain. Le Punter Tommy Townsend était un métronome, alors que la signature de l’ex-Giant Richie James devait mettre un peu de peps dans les retours.

Kansas City avait enfin vaincu le signe indien contre Cincinnati, ce qui ne devait rassurer personne. Les changements d’effectif n’étaient pas totalement anodins, ceux en couverture restant les plus suspects, mais le coeur était toujours présent et il fallait un cataclysme pour que les Chiefs ne soient pas encore champions de division et en playoffs. Ensuite, c’était une question de réussite (y compris avec les coups de sifflet).

La saison

Le bilan de saison régulière

Ce coup de mou post-bye week a coûté les deux premiers seeds, mais cela tombe bien : les Chiefs ont été moins bons à domicile, donc quoi de mieux que de passer quasiment la totalité du tournoi final à l’extérieur ? C’est frappant de voir que la franchise n’a pas du tout dominé contre les équipes terminant en positif ou les qualifiées en playoffs (les deux bilans ont pris une bonne baffe chacun)… ce qui ne l’a pas empêchée d’inverser tout ça en janvier et d’aller au bout, car elle a désormais l’habitude de ces rencontres à enjeux. Le calendrier a été un peu moins corsé à cause de la division et de la NFC East.

La réalité

Cela fait quelques saisons que la défense de Kansas City était en retrait par rapport à l’attaque avant de trouver son rythme sur la fin et de devenir une alliée de choix pendant les playoffs ; cette fois, Steve Spagnuolo a trouvé la solution : elle a été l’une des meilleures de la ligue, portant l’équipe dans certains matchs compliqués. Elle a tout juste connu une petite faiblesse en deuxième quart-temps (6.7 points – 14e) mais elle a conservé son efficacité sur premier drive (24 points – 6e) en plus de toutes les améliorations que vous voyez ci-dessus ; son seul petit défaut est d’avoir volé moins de ballons.

Il fallait bien cela pour contrebalancer la chute de productivité offensive qui a parfois été vertigineuse, à tel point que les deuxièmes mi-temps ont été des concours de ténacité comme le démontre l’Extra Stat. Ce crash monumental dans les TDs inscrits fait peur, et avant que vous ne posiez la question, la défense et les équipes spéciales ont eu la même productivité à ce niveau qu’en 2022, donc c’est bien l’attaque qui porte le poids de cette régression. D’aucuns diront que tout est relatif et qu’elle est tombée de très haut (encore heureux car cela lui permet d’être juste moyenne et non catastrophique), mais il est clair qu’il y a des soucis à corriger pour la saison prochaine.

Voici les récompenses de la saison :

(2021 : Patrick Mahomes)
(2022 : Patrick Mahomes)

Les deux pans offensifs ont chuté de concert (surtout au niveau des TDs) mais c’est le secteur aérien qui en a fait davantage les frais : -51.4 yards par match, -1.2 yards par passe tentée, -1.7 yards par complétion, -13 TDs. Pour autant, va-t-on diriger la bouche du canon sur le #15 ? Sûrement pas, on le fera sur d’autres un peu plus bas.

Mahomes aura plus souvent été victime que coupable de cette situation : ce n’est pas un hasard s’il a posté ses pires taux de TDs (4.5%) et d’INTs (2.3%) par passe tentée en carrière. Les Chiefs continuent de vouloir mettre la balle dans ses mains (regardez le ratio passe/course), mais il faut aussi lui donner de quoi faire.

(2021 : Rashad Fenton)
(2022 : Nick Bolton)

Deux joueurs prétendaient à cette récompense et le récipiendaire de 2022 aurait pu faire le doublé, mais nous avons décidé de mettre l’accent sur l’auteur du fumble forcé sur Christian McCaffrey au Super Bowl. Cette action cruciale est le point d’orgue d’une saison où le junior a progressé dans tous les compartiments : plus de pressions, meilleur en couverture (malgré ce taux de complétion qui pique les yeux) et plus sûr dans ses plaquages.

(2021 : Tyreek Hill & Travis Kelce)
(2022 : Travis Kelce)

Comme dit plus haut, il est tentant de donner la balle au #15, mais les Chiefs ont désormais un coureur qui tient la route avec Pacheco, donc pourquoi ne pas l’utiliser davantage ?

Le sophomore a définitivement pris le manche, reléguant Clyde Edwards-Helaire au rang de troisième coureur (derrière lui et Mahomes) ; il démontre une belle capacité à avancer, que ce soit au sol ou par les airs.

(2021 : Chris Jones)
(2022 : Chris Jones)

Non, vous ne rêvez pas, Sneed n’a PAS LÂCHÉ UN SEUL TD EN CENT CIBLAGES. Certes, il a récolté son lot de mouchoirs de pénalité, mais il a eu le talent pour se rattraper par ailleurs dans une saison incroyable.

C’est ce qui lui permet d’enlever le triplé du nez et de la barbe de Chris Jones, sachant que ce dernier paye aussi une défense contre la course qui a lâché un poil plus de leste : 113.2 yards par match (17e), 4.5 yards par course (24e), 10 TDs (4e) et 7 big plays (7e). La preuve, Chenal a terminé 2e pire top team en run stops.

Jones a eu un peu de moins de poids dans l’exercice, néanmoins il s’est bien repris dans le pass-rush avec notamment l’un des plus importants de la saison pour forcer le FG des 49ers sur l’avant-dernier drive du Super Bowl ; il a accumulé 22 stops dont 8 run stops et 71.5 pressions dont 10.5 sacks. Toute la ligne défensive n’a pas forcément été inspirée au sol d’ailleurs : Tershawn Warton a eu du mal à exister, le fantôme de Derrick Nnadi continue de rôder et Isaiah Buggs a lutté.

Sur les ailes, George Karlaftis a été plus incisif mais on veut en voir encore plus de sa part avec 30 stops dont 14 run stops et 63.5 pressions dont 10.5 sacks. Mike Danna est toujours un sérieux contributeur via 34 stops dont 21 run stops et 39.5 pressions dont 6.5 sacks. Charles Omenihu a été diablement efficace dans un temps de jeu réduit après sa suspension (29 pressions dont 7 sacks). Le premier tour Felix Anudike-Uzomah n’avait pas à faire de miracles derrière eux, et il a appris le métier en attendant son heure.

(2021 : Creed Humphrey)
(2022 : Isiah Pacheco)

Voilà un tableau des stats qui résume bien la saison du deuxième tour : il a été de tous les coups, les bons (production) comme les moins bons (les drops).

Cependant, quand on regarde autour de lui, il a clairement été une vraie bonne acquisition… d’ailleurs vous savez quoi ? On y va de suite, mettez vos casques.

(2021 : Le pass-rush)
(2022 : La phase de kick)

Allez, poussez le canon, mettez en joue les cibles et FEU ! Pardon ? Travis Kelce et Rashee Rice ne sont pas hors de la zone de tir ? Mettez-les juste au bord, ils doivent quand même prendre un petit éclat car ils ont participé à la grande épidémie du groupe : 44 drops soit 6.9% des tentatives (pires marques). En effet, même Kelce a été touché, accumulant 93 réceptions pour 948 yards, 5 TDs, 12 big plays et 7 drops ; cela fait 15 avec Rice.

Mais au moins, les deux compères ont fait leur maximum pour contrebalancer avec une grande importance dans le jeu aérien. Une fois qu’ils sont mis de côté, on se retrouve avec Justin Watson à 460 yards et 3 TDs, Marquez Valdes-Scantling à 315 yards et 1 TD, Noah Gray à 305 yards et 1 TDs ; Mecole Hardman a au moins eu l’excuse de sa blessure après son retour sur échange en cours de saison, et il a scoré le TD du titre. Sinon, a-t-on besoin de revenir sur Kadarius Toney, l’homme au 5 drops en 38 ciblages et à la pénalité fatale contre Buffalo ?

Au passage, beau redressement de la phase de kick : après la saison compliquée en 2022, Harrison Butker a repris les choses en mains avec 137 points (4e NFL).

(2021 : L’attaque aérienne)
(2022 : La ligne offensive)

Sneed a été incroyable, mais toute l’unité a tenu la route à l’exception des INTs qui ont parfois manqué.

Trent McDuffie a été de tous les combats : si on doit regretter une chose, c’est qu’il n’ait pas attrapé quelques passes pour améliorer le tableau avec 33 stops dont 14 run stops, 16 pressions dont 3 sacks, 5 fumbles forcés, 65.8%, 2 TDs, 7 passes défendues et 94.4 de Cover Rating. Comme il a partagé son temps dans le slot, c’est le sophomore Jaylen Watson qui a complété sur l’aile avec des résultats encore mitigés (56.3%, 4 TDs, 6 passes défendues et 103.6 de Cover Rating). Un autre sophomore, Joshua Williams, a aussi limité les réceptions (44.8%, 2 TDs, 4 passes défendues et 82.7 de Cover Rating).

Les Safeties ont été menés par Justin Reid et sa saison pleine, mais qui aurait pu avoir encore plus d’impact contre la course : 35 stops dont 19 run stops, 7 pressions dont 3 sacks, 62.9%, 3 TDs, 1 INT, 7 passes défendues et 89.7 de Cover Rating. Mike Edwards et Bryan Cook ont joué les seconds couteaux avec des fortunes diverses même si, coïncidence, ils ont chacun 2 fumbles récupérés dont un TD : le premier a tenu bon (48.4%, 2 TDs, 1 INT, 5 passes défendues, 77.2 de Cover Rating) ; le deuxième a trop souvent été mis à mal (12.1 yards par ciblage, 18.2 yards par complétion, 4 TDs, 1 INT, 130.4 de Cover Rating). Chamarri Conner a été trop laxe (85%) mais il a réussi 1 INT.

(2021 : La défense contre la course)
(2022 : La couverture)

Non pas qu’elle ait été catastrophique, mais c’est l’unité qui a le moins bien marché malgré les efforts de Pacheco ; notons qu’elle n’a pas souvent été aidée par une ligne offensive sur laquelle nous reviendrons. Nous avons évoqué CEH plus haut, il a eu du mal à trouver sa voie les rares fois où on a fait appel à lui avec 87 touches pour 411 yards, 3.2 yards par course et 2 TDs. Jerick McKinnon, comme toujours, a fait son beurre à la réception via 4 TDs mais a fini la saison sur IR.

(2021 : Joe Thuney & Orlando Brown)
(2022 : Les ajouts chez les receveurs)

L’ex-Charger n’est toujours pas un grand féru de la défense contre la course, mais il a apporté son activité, notamment quand Nick Bolton a dû visiter l’infirmerie pendant la saison.

Alors que ce dernier et Willie Gay ont davantage été actifs dans ce secteur (62 stops dont 36 run stops à eux deux), il a pu offrir ses services dans les autres secteurs. Le groupe des Linebackers a su se diviser les tâches pour former un groupe solide et polyvalent, en rajoutant Chenal cité plus haut. On pourrait presque dire que le groupe entier est sous-coté.

(2021 : Aucun)
(2022 : Aucun)

La ligne offensive de Kansas City a aligné quatre titulaires sur la totalité des matchs : c’est une bonne chose. Taylor a été l’un d’entre eux avec ce total monstre de pénalités qui est devenu une blague récurrente ; c’est une moins bonne chose. Cependant, ce n’est pas seulement le fait de pouvoir se faire un drap de lit avec tous les mouchoirs jaunes reçus qui lui octroie cette récompense : son niveau a été largement insuffisant, notamment au sol, pour le prix où il a été payé. Au fait, si vous avez bien suivi, les Chiefs ont aligné les deux joueurs ayant récolté le plus de pénalités cette saison (Sneed et Taylor).

À sa décharge, l’ex-Jaguar n’est pas le seul à avoir un peu pédalé dans la semoule : Donovan Smith a été loin d’être dominateur, et quand il a été remplacé sur blessure, Wanya Morris a lutté de même. Les trois ont été un peu plus inspirés en protection même si la mobilité de Mahomes a couvert une partie des soucis.

Le coeur de l’unité, lui, a été plus disponible (sans surprise) et plus solide (sans surprise non plus) : Creed Humphrey, Joe Thuney et Trey Smith ont raté très peu de snaps et ont continué sur leur lancée pour former un ensemble de qualité. C’est surtout aux ailes que les difficultés sont apparues.

(2021 : La victoire en Divisional Round)
(2022 : Un deuxième Super Bowl en quatre ans)

Le doublé. Kansas City a presque été tenté d’innover en étant le premier champion à l’issue d’une double prolongation, mais Mahomes en a décidé autrement dans un nouveau drive de légende.

(2021 : Maudits Bengals)
(2022 : La défaite en Week 3 à Indianapolis)

La défaite 24-9 à Denver en Week 8. Pas un seul TD marqué contre une équipe à 2-5 que les Chiefs avaient battu 16 fois de suite. Un non-match bien plus incompréhensible que les défaites suivantes face à des futurs qualifiés en playoffs (et les Raiders revigorés sous Antonio Pierce).

Le futur

Tel est le résultat d’une équipe qui est la seule de sa division à avoir terminé en positif et qui croise avec la NFC South. Il y a bien quelques écueils ici ou là, mais à moins que le vent de la révolution ne souffle dans l’AFC West, Kansas City est évidemment le meilleur candidat à sa propre succession… et après on verra.