Benjamin Aillaud : « Je veux faire les choses bien avec les chevaux que j'ai »

Ce week-end, lors du concours international d'attelage de Saumur, Benjamin Aillaud a été sacré champion de France à la suite du CAIO 4*. Le meneur tricolore revient sur sa performance et celle de son team.

Propos recueillis par Emma BILLET

Vous terminez tout juste l'international d'attelage de Saumur avec, en poche, un titre de champion de France. À chaud, quelle est votre réaction ? 
Ce qui est génial, c'est que ce championnat de France se trouve sur une étape de construction pour les championnats du monde en Hongrie. Saumur est un très beau concours pour la discipline de l'attelage. Ensuite, je suis très content. C'est un projet qu'on a démarré sérieusement l'année dernière avec ces chevaux-là.
Je les ai depuis longtemps, j'ai fait du spectacle avec eux avant. Ils ont fait des tournées à l'international et principalement de la liberté. Ce sont des chevaux très polyvalents et je les ai formés à l'attelage sur le tas. Je me disais « puisqu'on les a, on va en faire des chevaux de tête et on va s'appuyer sur la relation qu'on a avec eux à pied pour les bâtir et faire du haut niveau. » Après cela, tout s'est construit assez vite. Ils ont rapidement fait de belles performances.
Aux championnats d'Europe l'année dernière, ils ont terminé onzièmes. Je suis encore en train de trouver mes marques avec eux mais ça devient de plus en plus fluide et agréable. Ce sont des chevaux merveilleux. Je suis vraiment très content de ce qu'ils ont pu produire à Saumur. 

« Pour les championnats du monde, on sera là »

Sur l'épreuve de dressage, votre note est un peu en dessous de celle de vos coéquipiers. À quoi cela est-il du ? 
J'ai des chevaux plus petits qui ont donc moins d'action. Quand on voit le niveau et la qualité de chevaux qu'il y a sur le circuit en dressage, nous sommes moins bien équipés que les autres meneurs. Je suis obligé de leur demander plus, d'aller chercher plus loin. Ils doivent se tenir dans des postures dans lesquelles ils se donnent à fond pour montrer de grands mouvements et rivaliser avec les autres. Peut-être que je suis allé un peu trop loin dans mes demandes ce week-end, mais justement, on travaille là-dessus.
Nous avons fait le meilleur dressage français à Kronenberg où nous sommes sortis en 56 points. Là on s'en sort avec un score de 61. On est en train de se construire et de trouver la stabilité nécessaire pour faire de meilleures performances. Il faut que j'arrive à leur demander les choses sans qu'ils aient à dépasser leurs limites, tout en les laissant s'exprimer complètement sur le dressage. On a encore du travail mais pour les championnats du monde, on sera là. Nous ne sommes pas loin de faire quelque chose de bien. 

À l'issue du marathon, Anthony Hordé était encore devant vous au classement, comment vous sentiez-vous avant la maniabilité ? 
Je ne me suis jamais senti en compétition contre les Français. Je ne considère pas cela comme une compétition. Pour moi c'est vraiment un moyen d'être challengé avec mes chevaux sur ce que je sais faire avec eux et sur ce que je suis capable de produire. Je veux faire les choses bien avec les chevaux que j'ai et me pousser dans mes retranchements.
À Saumur Attelage, on est près de faire le sans-faute dans le temps. Il y avait une vraie difficulté technique sur le parcours et c'est plutôt cet axe-là qui m'intéresse. C'est-à-dire essayer de trouver des solutions pour réussir au mieux une maniabilité de niveau 4* plutôt que de se focaliser sur l'aspect compétitif d'autant plus si mes adversaires sont mes coéquipiers français.  

« Je suis encore bien loin des limites de mes chevaux »

Au total, vous terminez à 170,87 points. Comment qualifieriez-vous ce score ? 
J'ai de la marge partout. Si on compare avec Kronenberg en dressage par exemple, il y a 5 points, presque 6, que je n'ai pas eus. Mon objectif est de passer ce score sous le seuil des 55 points la fin de saison. Sur le marathon, je suis encore dans la construction et la mise en place des réglages qui nous permettront d'avancer. Je devrais commencer à voir les résultats au concours à Aix-la-Chapelle d'ici un mois et demi. Les chevaux sont près à me le donner. Bientôt je vais pourvoir les laisser réaliser ces choses-là en ayant les doigts plus ouverts et obtenir à la fin le même résultat voire quelque chose de mieux. On peut facilement gagner une dizaine de points. 
Pour ce qui est de la maniabilité, je pense qu'on a fait quelque chose de bien. Les trois points sont de trop à mon goût mais je ne peux m'en prendre qu'à moi-même. J'ai été trop scolaire sur une entrée de serpentine, j'ai tellement préparé ce passage que j'ai commis la faute sur le côté opposé. En termes de temps, j'avais prévu d'utiliser tout le temps qui m'était imparti. Le but n'était pas de faire des folies, je ne voulais pas mettre les chevaux dans le rouge. J'arrive à proposer quelque chose de précis et dans les temps donc je pense qu'on a été au rendez-vous sur cette épreuve-là.
Mes chevaux sont fascinants parce qu'ils ont encore sous le pied. À chaque fois que j'ai l'impression que je suis au maximum de ce qu'on peut faire ensemble, ils me montrent que je suis encore bien loin de leurs limites et de tout ce qu'ils peuvent me donner. 

« Perfectionner le travail »

La dernière fois que vous vous êtes exprimé dans Cheval Magazine, vous expliquiez que votre team est assez jeune. Qu'en est-il aujourd'hui ? 
Au niveau de la construction, on est vraiment sur du réglage de fond. Ils sont jeunes certes, mais aujourd'hui ils connaissent leur boulot. Ce qu'il nous reste à faire c'est de mettre de l'huile dans tous les rouages. C'est-à-dire faire de l'analyse de compétition pour arriver à passer cette marge de points. Aujourd'hui il n'est plus vraiment question de construire le team mais plutôt de perfectionner le travail, la technique et le relationnel.  

En août dernier, vous avez déclaré vouloir donner à vos chevaux plus de force, d'aisance et de souplesse. Est-ce que l'objectif a été atteint ? 
Complètement. Avoir plusieurs mois disponibles pour mettre en place ce travail de fond a vraiment été un luxe pour moi cet hiver. Je souhaite récupérer ce travail au cours de la saison. Je ne veux pas et je ne peux pas leur demander d'être sur les chapeaux de roues d'avril à septembre. C'est une durée trop longue pour garder l'explosivité de petits chevaux comme eux. Je vais vraiment pouvoir les monter en puissance au fur et à mesure et c'est vraiment grâce au travail de cet hiver. Quand je vois la facilité avec laquelle nous avons réalisé le marathon et la maniabilité à Saumur, je ne peux qu'être satisfait du travail qu'on a fourni pendant ces mois de travail. Mon seul regret est de ne pas avoir réussi à transformer nos efforts sur les points du dressage à Saumur. Mais ce n'est que partie remise. 

« De vraies chances de médailles »

Sur quoi avez-vous axé votre travail pour arriver à ces résultats ? 
Je suis énormément monté à cheval. J'ai fait beaucoup de gymnastique, de travail rassemblé. À cheval il y a des choses qu'on arrive plus facilement à régler que quand on est en attelage. Les chevaux fonctionnent aussi beaucoup en liberté et à pied. Cela permet de maintenir une bonne cohésion entre eux. L'équilibre dans le groupe est primordial alors quand on l'a, on le garde et on le cultive. Entre le travail monté, attelé, à pied, en longue rênes ou en extérieur, le menu est assez varié donc on ne les blase pas. Là-dedans, il ne faut évidemment pas oublier le repos et la récupération. C'est tout aussi important que le travail de fond. 

Quels sont vos objectifs pour cette année ? 
Début septembre auront lieu les championnats du monde en Hongrie. C'est notre objectif numéro un. Pour les préparer on va se rendre d'ici un mois et demi à Aix-la-Chapelle, puis au CAIO 4* de Exloo, aux Pays-Bas. Ça sera notre dernière épreuve avant les championnats à Szilvásvárad. D'ici là, on va faire beaucoup de travail de préparation, pour qu'on soit au niveau du talent des chevaux. 
Au-delà de participer aux Mondiaux, voir la France sur le podium est aussi dans mes objectifs. Si je récupère les points que j'ai perdus en dressage à Saumur et si Anthony (Hordé, ndlr) fait une maniabilité correcte, on arrive à dépasser la Belgique. Techniquement, c'est possible. Mais il faut reconnaître que l'Allemagne, la Belgique et les Pays-Bas sont des adversaires très costaux. La France a tout pour être dans la course, mais elle n'a pas de marge. Il faut donc absolument qu'on arrive à stabiliser le dressage et la maniabilité. Si nous nous y tenons, nous avons de vraies chances de médaille. 

« J'ai la chance de partager mon sport avec ma famille »

À Saumur, parmi les participants nous avons vu passer le nom d'Ewen Aillaud, deuxième de la Children Pony Single. Qu'est-ce que ça vous fait de concourir sur les mêmes événements que votre fille ? 
C'est tout simplement génial. J'ai la chance de partager mon sport avec mon épouse, mon fils et ma fille. On a déjà couru les championnats d'Europe Children, les championnats du monde Single et à quatre la même année. Ce qui est super dans cette discipline, c'est que c'est un sport d'équipe avec les chevaux et la ou les personnes qui nous accompagnent dans l'attelage. Mais en plus de cela, j'ai l'opportunité de former une team à part entière avec ma famille et de partager nos aventures avec nos chevaux ensemble. 

Retrouvez la biographie de Benjamin Aillaud ICI.

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